Silence

Comme c'était la veille du sabbat des Juifs

et que le tombeau était tout proche, 

ils y déposèrent Jésus.

Jean 19, v.42

Silence

où est passé

l'infatigable marcheur

où est passé

le poète étonné 

où est passé

l'homme au grand coeur

où est passé

le fils du charpentier

~ 

Silence

le désert partout

aux alentours 

~

Silence

empli de larmes

de sanglots

de tristesse

empli de souvenirs

d'images

de paroles

empli de questions

d'incompréhensions

de doutes

empli de remords

de honte

de douleurs

Silence

~

Silence

qui n'en est pas un

tellement grouillent

à l'intérieur

à l'extérieur

le bruit de la pensée

le bruit du monde

~

Silence

à redécouvrir

à dépoussiérer

à laisser éclore

respirer, chanter

~

Silence

où se perçoit déjà

dans l'intime de l'intime

à l'oreille attentive

au coeur discret

le murmure

d'une Aube miraculeuse

Vendredi Saint

Après quoi, sachant que dès lors tout était achevé, 

pour que l’Ecriture soit accomplie jusqu’au bout, 

Jésus dit : 

« J’ai soif » 

Jean 19, v.28

Fissures à mes lèvres

Perte de contact

Je n'embrasse plus

Ni monde

Ni délices

La vie

Fuyante

Œuvre en absence

Jusqu'au bout

À l'ultime face-à-face

Vide

Empli d'angoisse

Mon désir

Ta grâce

Fissures sur ma langue

Paroles creuses

Je ne parle plus

Mes mots ne comptent

Ni pour beurre

Ni pour l'or

La vie

Soupirante

Murmure son silence

Jusqu'au bout

Au chevet des phrases folles

Vide

Empli de symbole

Mon désir

Ta parole

Fissures en mon âme

Espérance éteinte

Je ne vibre plus

Du désert secoué

Ni par souffle

Ni en douce

La vie

Insistante

Déchire les violences

Jusqu'au bout

À la peau des chapelles

Vide

Empli de réel

Mon désir

Ton appel

-

De mes lèvres

À mon âme

Ta soif

Dédouane

Écroule

Frontières et dédales

Enfin libre

 Ta soif

Ton sang

Ta vie

Tout coule

Tout m'abreuve

Du désir de toi 

Reprendre pied

Il se leva de table, ôta son vêtement de dessus

et prit un linge dont il s'entoura la taille.

Ensuite, il versa de l'eau dans une cuvette

et se mit à laver les pieds de ses disciples,

puis à les essuyer avec le linge qu'il avait autour de la taille.

Jean 13, v.4-5

A quoi vous sert

un regard étincelant de compassion

un coeur débordant d'amour

une bouche annonçant la Bonne Nouvelle

des mains prêtent à rendre service

si vous restez là

immobile

figé

parce que je suis parti ?

Puissent ces pieds

qui vous ont porté

dès le commencement

de cette aventure

Puissent-ils

continuer à marcher

vers l'Aube qui vient

vers votre prochain

vers ce Royaume

que vous pensez inaccessible

mais qui est juste là

au pas suivant

dans le printemps

des coeurs en marche

Encore proche

Jésus dit : 

« Allez à la ville chez un tel et dites-lui : 

“Le Maître dit : Mon temps est proche, 

c’est chez toi que je célèbre la Pâque avec mes disciples.” »

Matthieu 26, v.18

Allez

Sur les routes creuses

Les sentiers du demain

 

Allez

Vers les refuges terreux

Goûtez

Leurs tables pleines

Leurs mots raffinés

 

Allez

Où le temps grignote

La frontière de la vie

L'enclos de la mort

 

Allez

Vers la grande vibration

 Le séisme quotidien

Touchez

Les écorces

Rompues de présence

Brisez

Les élans

Ruinés de sève

 

Allez

Loin de l’hier endormi

Là où s'éveille aujourd'hui

Allez

Quelqu'un vous attend

De l'autre côté de votre chant

 

Allez

Encore quelques jours

Pour vos pas étourdis

Bientôt l'éclat

Le tourment

Le fracas

Pour briser tout le faux

Et promettre le repos

 

 

Les chemins se séparent

Judas prit donc le morceau de pain

et sortit aussitôt. Il faisait nuit.

Jean 13, v.30

Tant de kilomètres

parcourus ensemble

Tant de souvenirs

en commun

Tant de miracles

au long des jours

Et soudain

les chemins

se séparent

~

Tant de villages

traversés

Tant de maisons d'hôtes

improvisées

Tant de repas

de tablées différentes

Et soudain

quitter le festin

la boule au ventre

~

Tant d'aubes

priantes

Tant de midis

bouillannants

Tant de crépuscules

étonnés

Et soudain

choisir la nuit

plutôt que la lumière

~

Il ne le retient pas

Il le laisse aller

Partageant une dernière fois

le pain de la fraternité

Sachant déjà en secret

que la nuit n'aura pas

le dernier mot

Parfums au désert

« Pourquoi n’a-t-on pas vendu ce parfum trois cents deniers, 

pour les donner aux pauvres ? »

Jean 12, v.5

 Sans écho

Lugubre ou malsain

Ni trace

De peur

De haine

De chant de sirènes

Elle verse

Sans pensée

D'arrière ou de fond

L'offre pieuse

Fleurie

Généreuse

Elle donne

Face à lui

Ses gestes précis

S'envolent du silence

Ses esquisses

Sur ce corps en partance

Éveillent l'ambiance

À faire trembler les tendres

Elle vit

Suave oasis

Des esprits en errance

Ses paroles inutiles

Attisent les outrances

Outrages et révoltes

Enrichies de méfiance

Elle tremble

Dans un souffle

Habité d'évangile

Une question intranquille

Un reflet d'âme en souffre

Il tremble

-

Tout en lui prend la fuite

Tout en elle sent la suite

Dimanche des Rameaux

Allez au village qui est là devant vous.

Dès que vous y serez arrivés, vous trouverez un petit âne attaché,

sur lequel personne ne s'est encore jamais assis.

Détachez-le et amenez-le-moi.

Marc 11, v.2

Le miraculeux

complice de l'humilité

Chemin du Royaume

Le temps des signes

Les grands prêtres et les Pharisiens réunirent alors un conseil et dirent : 

"Que faisons-nous ? Cet homme opère beaucoup de signes."

Jean 11, v.47

Il y a celui qui brille

Qui transpire l'évidence

À peine aperçu

La douce conviction

Du brouillard apaisant

Il y a celui qui scintille

Qui vibre de ses sens

Lointain et proche

Sa parole rassure

Les débris de nos poches

Il y a celui qui faiblit

Qui sombre au silence

Intime et discret

Le regard l'éveille

Au désir d'existence

Il y a celui qui hésite
Qui dérègle la balance
Sans gêne ni malheur
Le doute transforme
Conviction en labeur

Il y a celui qui marche

Qui parle de naissance
La source livre
Tous les mots
Les promesses
Dans l'écrin d'une Bible
Dans la liberté d'un souffle

 

Chamboulement

Les Juifs ramassèrent de nouveau des pierres pour les jeter contre lui.

Jésus leur dit alors : « Je vous ai fait voir beaucoup d'oeuvres bonnes de la part du Père.

Pour laquelle de ces oeuvres voulez-vous me tuer à coups de pierres ? »

Ils cherchèrent une fois de plus à l'arrêter,

mais il leur échappa.

Jean 10, 31-32-39

Chaque jour

Il annonce la Bonne Nouvelle

en mots et en actes

labourant les certitudes des uns

les préjugés des autres

Tant d'amour

de paix, d'espérance

offert gratuitement

à tous

où est le problème ?

Personne n'est indifférent

Il y a ceux

qui rendent grâce

Il y a ceux

qui prennent les pierres

Et Lui

une fois de plus

leur échappe

comme il aurait pu

changer les pierres en pains

Jour blanc

En vérité, en vérité, je vous le dis, 

si quelqu’un garde ma parole, il ne verra jamais la mort.

Jean 8, v.51

Sortie de piste

 En paysage coton

Mes yeux scrutent et se heurtent

Au mur blanc

Le ciel sous mes pieds

Enlace et dérobe

L'équilibre, le tranquille

Et le faste

Je passe

Je repasse

De témoin en témoin

 Mes repères s'accrochent

S'agrippent au proche

Dans l'attente du lointain

La lumière partout

Hante les airs nébuleux

Couleurs et reliefs

Cèdent au neutre enveloppant

Voici un son

Echo unique

Témoignage vivant

Voici le son

Le supplice accompli

L'horizon recueilli

Voici mon son

L'ailleurs dans ma main

La frayeur au lointain

Le Verbe en marche

Si vous restez fidèles à mes paroles,

vous êtes vraiment mes disciples ;

ainsi vous connaîtrez la vérité

et la vérité vous rendra libres.

Jean 8, 31-32

Laisser le Verbe

travailler mes terres

semer dans mes obscurités

ses graines de lumière

Laisser le Poète

parcourir mes sentiers

bousculer mes impasses

délier les chemins oubliés

~

Ouvrir l'oreille

pour que la Source

se faufile

jusqu'au coeur

Abreuvant

le jardin caché

préparant

l'intime éclosion

~

Tout comme Lui

sa Parole est en marche

cherchant à loger

chez qui veut bien l'accueillir

Venant libérer

aérer dépoussiérer

faire le nécessaire

ménage du printemps

Au commencement, il y avait la lettre

Jésus leur répondit : 

« Vous êtes d’en bas ; moi, je suis d’en haut ; 

vous êtes de ce monde, moi je ne suis pas de ce monde. 

Jean 8, v. 23

Tant de mystère

Au devers de tes courbes

 Dans l'intime entretien

Du regard et des mains

Le frisson

Vagabonde

Captif de tes formes

Le frisson

Ondule

Fidèle à ton ombre

Énigmes et arcanes

Se brisent par ta trace

Ton passage désigne et relève

Le borgne

Et l'endormi

Oui

Ta silhouette

Frémit tout ce qui chante

Tout ce qui hante

Saisi par ta grâce

Les charmes succombent

Les sceaux se fêlent

 

Au parchemin

De tout corps

Tu ouvres l'être

 

Courant d'air

Celui qui doit vous venir en aide viendra :

c'est l'Esprit de vérité qui vient du Père.

Je vous l'enverrai de la part du Père

et il me rendra témoignage. 

Jean 15, 26

Souffle du Vivant

Brise d'Eternité

Impossible de savoir

d'où Tu viens

Ni de connaître

où Tu vas

Tu virevoltes

libre

comme l'oiseau

au petit matin

Cherchant

parmi la forêt humaine

la branche accueillante

d'un coeur attentif

Mistral de Tendresse

Tourbillon de l'Amour

Invisible

Tu te laisses pressentir

au plus intime

de l'intuition

Insaisissable

c'est Toi

qui viens saisir

étreindre en secret

Indicible

Tu habites le silence

murmurant la paix

semant l'espérance

Vent de la Promesse

Bise du Créateur

5ème dimanche de Carême

Jésus pleura.

Jean 11, 35

Passages rapides

Des ombres dans leur danse

La lumière repose

Bonne nouvelle

Les chefs des prêtres et les Pharisiens demandèrent :

"Pourquoi n'avez-vous pas amené Jésus ?"

Les gardes répondirent : 

"Jamais personne n'a parlé comme lui !"

Jean 7, 45-46

Partout où Il passe

personne ne reste indifférent

Le rythme de sa marche

s'adaptant toujours

à celle ou celui qu'Il rencontre

en chemin

La rosée de son regard

revitalisant

tout ce qu'Il effleure

de la prunelle de ses yeux

Le pain de sa parole

étonnante, inspirante

toujours aussi croustillante

qu'au premier jour

~

Il y a ceux qui refusent d'écouter

qui l'accusent encore et encore

figés par la Loi de Moïse

Qu'ont-ils à perdre d'ouvrir leurs oreilles ?

Il y a ceux qui l'écoutent

sans même savoir de quoi Il parle

pressentant malgré tout

que l'essentiel est là 

Qu'ont-ils à gagner à accueillir sa poésie ?

~

Sa Bonne Nouvelle

toujours vivante et accessible

alors que les siècles se sont succédés

sans relâche 

Parole vivante

amoureuse, authentique

à tout jamais gravée

dans le recueil de l'éternité

Au delà de nos croûtes

Mais lorsque ses frères furent partis pour la fête, 

Jésus se mit en route, lui aussi, 

sans se faire voir et presque secrètement.

Jean 7, v.10

Bousculer le monde

Trembler son quotidien

Avec le nez dehors
Et le cœur sans peur

Sortir juste ce qu'il faut
D'aventure
De joie et de peine
Transformer le retour
En gestes doux
Promesse et tendresse

Vagabonder heureux
Les routes dépavées
Bondir de rail en rail
S'accrocher aux lignes fuyantes
Aux horizons rapprochés

Enfin être
À portée de monde
 Savourer l'immédiat
Du pain quotidien

Lumière

Jean était comme une lampe qu'on allume pour qu'elle éclaire

et vous avez accepté de vous réjouir un moment à sa lumière.

Jean 5, 35

Parmi le balbutiement des étoiles

l'aube qui déjà

prépare le chemin du réveil

dans le ciel encore obscure

Avant les premiers rayons du soleil

l'aurore qui déjà

colore l'horizon

de la promesse d'un jour nouveau

~

Parmi la paperasse humaine

Jean qui déjà

prépare le chemin de la Source

dans le désert aride

Avant les premières étincelles du Verbe

le Baptiste qui déjà

relève des eaux du Jourdain

Celui qui sortira debout du tombeau

~

Mystère de la lumière

qui se faufile

dans la moindre des failles

pour répandre ses rayons

Soleil qui se multiplie

si on l'accueille

et le laisse briller

comme les gouttes de rosée

"Oui, regarder cette lumière. L'accueillir en silence.
A travers laquelle s'ouvre en nous le chemin de la Source.
Nul commentaire à cela qu'on ne peut que vivre."

- Georges Haldas

Marche sur les eaux

Jésus reprit la parole et leur dit : 

 « En vérité, en vérité, je vous le dis, 

le Fils ne peut rien faire de lui-même, 

mais seulement ce qu’il voit faire au Père : 

Tout ce que le Père fait, 

le Fils le fait également. »

Jean 5,19

Regarder en amont

Hauteur insondable

Montagne infléchie

Au pinceau souple

Discret et serein

 

 Devenir saumon

Entre désir infini

De l'océan profond

Entre souvenir épris

De source sans fond

 

-

 

Regarder en aval

Chutes promises

Loin des poussières

Vers l'immense

Le trouble et la joie

 

Devenir radeau

Entre dérive audacieuse

Des sillons fatigués

Entre chute heureuse

Dans les bras assoiffés 

-

Agir

Sur le sol

L'entre-deux mobile

Toujours en voyage

Jamais en errance

 

Agir

Sur les eaux

Dans le trouble fébrile

Perdre pied

Enfin

Flotter sur l'écran

Du visible

Le miroir des possibles

 

 

Incognito

Ils lui demandèrent alors : 

« Qui est celui qui t'a dit : «Prends ta natte et marche» ? »

Mais l'homme qui avait été guéri l'ignorait,

car Jésus avait disparu dans la foule qui se trouvait à cet endroit.

Jean 5, 12-13

Lui la lumière du monde

agissant en incognito

Se souciant davantage

du bien être de son frère

que d'une renommée personnelle

Lui le fils du Très-haut

restant toujours humble 

Pas une parole de trop

une attitude amplifiée

mais une tendresse enfantine

~

Heureux celui à qui

l'évidence reste cachée

mais qui peu à peu

fait son chemin

attentif et recueilli

à l'écoute des saisons de la vie

du soleil et des intempéries

jusqu'à voir le Printemps

fleurir en son coeur

Rencontre éteinte

«Vas-y, lui dit Jésus, ton fils vit.» 

Cet homme crut à la parole que Jésus lui avait dite et s’en alla.

Jean 4, v.50

 

Reste l’écho

Le rythme familier

Du soupir quotidien

Rencontre éteinte

Parole suffisante

Pleine

Gorgée de vie

De scandale

De promesse

Ivre

Rencontre éteinte

La mort titube

Chancelle et recule

Son ombre apaisante

Toujours présente

Encore latente

Encore un peu

Distante

Rencontre éteinte

La foi en bandoulière

Il part

Rejoint l’éternel changeant

Le chaos monotone

Mystère funèbre

La voix souveraine

Porteuse d’éternel

Murmure son refrain

Son harmonie heureuse

Deuil en creux

Accueil des semences

Au bout des larmes

Le chemin

La vie

Au cœur du chagrin 

 

Lumière

Pendant que je suis dans le monde,

je suis la lumière du monde.

Jean 9, 5

Dans la nuit du monde

L'étoile filante du matin

crépite toujours

Qui suivre?

Le pharisien, debout, faisait cette prière en lui-même: 

"O Dieu, je te remercie de ce que je ne suis pas comme les autres hommes"

Luc 18, v.11

 Merci de n'être

Ni l'autre

Ni moi

Mais l'entre-deux

Ce lieu frontière

Entre univers et passion

Ce lieu charnière

Entre le monde et soi

Je ne suis

Ni étoiles

Ni poussière

Juste une ancre

Repère de passage

Merci de naître

Au jour

À la nuit

Dans le proche mystère

Dans ce corps grossier et infini

Par cette Parole ivre

Retourner l'apparence

Rassembler toute errance

Chuter en reconnaissance